Questions et réponses

Pourquoi réviser la loi sur l'aménagement du territoire?

Cette révision vise à séparer plus clairement les territoires constructibles des territoires non constructibles, à assurer un développement compact du milieu bâti, à mieux utiliser les friches urbaines et à réduire les zones à bâtir surdimensionnées. Elle réaffirme par ailleurs que les zones à bâtir doivent correspondre aux besoins prévisibles pour les quinze ans à venir. Celles qui dépassent de beaucoup ces besoins devront être réduites. Il reste toutefois possible de classer des terrains en zones à bâtir lorsque la croissance de la population et l'installation de nouvelles entreprises sont prévisibles.

Il est important de définir les zones à bâtir avec mesure, car de trop grandes réserves favorisent une urbanisation éparse: la surface occupée par le milieu bâti s'accroît, et le paysage en souffre, et avec lui le tourisme et l'agriculture. En outre, le raccordement de ces zones au réseau routier et aux canalisations d'eau, d'électricité et d'égouts entraîne une charge financière plus élevée.

Quelle superficie les zones à bâtir couvrent-elles aujourd'hui?

Les zones à bâtir s'étendent aujourd'hui sur environ 2300 km2 en Suisse. Près d'un cinquième de cette surface ne comporte aucune construction. La part des réserves est globalement plus importante dans les régions agricoles et les régions touristiques que dans les espaces urbains. Dans certaines communes, ces zones suffisent pour les cinquante prochaines années au moins et sont donc largement surdimensionnées. Comptant souvent des constructions dispersées et de nouveaux bâtiments très à l'écart du centre des localités, elles aggravent le mitage du territoire.

De combien d'hectares la révision entraînerait-elle le déclassement?

Il est pour l'heure impossible d'indiquer avec précision quelles seront la localisation et l'ampleur des déclassements nécessaires. En effet, il faut au préalable calculer en détail les besoins futurs en zones à bâtir, ce qui suppose de définir une méthode de calcul adéquate. La Confédération et les cantons le feront dans le cadre d'une procédure commune et fixeront des directives techniques en la matière. C'est pourquoi on ne peut aujourd'hui que brosser un tableau approximatif des endroits où l'offre est supérieure aux besoins pertinents.

Une étude sur les réserves de zones à bâtir et sur les besoins futurs, menée en 2008 par Fahrländer Partner AG sur mandat de l'ARE, fournit des repères pour une première estimation. Il ressort de cette mise en regard des réserves existantes en 2007 avec les besoins estimés jusqu'en 2030 que certaines régions disposent de réserves excessives de zones à bâtir, qui plus est souvent au mauvais endroit car situées en grande partie dans des régions plutôt rurales, où la demande est comparativement faible.

Il faut toutefois s'abstenir de tirer de l'étude Fahrländer des conclusions hâtives sur les déclassements. De fait, pour mesurer correctement les effets concrets de la révision, les aspects suivants doivent être pris en considération: le développement économique et la croissance de la population constatés ces dernières années se traduisent par une utilisation accrue de terrains constructibles. La part de zones à bâtir non construites a par conséquent reculé depuis 2007. Dans l'intervalle, l'Office fédéral de la statistique a par ailleurs revu nettement à la hausse ses estimations de l'évolution démographique. Ces changements entraînent une réduction de l'offre et une hausse de la demande, ce qui diminue d'autant les besoins de déclassement.

Quelles indemnisations les déclassements entraîneront-ils?

C'est seulement au cours de l'adaptation des plans directeurs et des plans d'affectation qu'il sera possible de savoir s'il faut déclasser des terrains, où il faut le faire et quelle superficie de terrain à bâtir doit être déclassée. Les déclassements peuvent avoir pour conséquence l'obligation d'indemniser les propriétaires concernés. Cette obligation incombe en principe aux communes ou, exceptionnellement, aux cantons. Le droit à une indemnisation dépend notamment de la probabilité de construction des terrains concernés et de l'échéance à laquelle cela aurait été fait.

Les cantons et les communes peuvent utiliser le produit de la taxe sur la plus-value pour financer les indemnités dues. La révision de la loi sur l'aménagement du territoire prévoit en effet le prélèvement d'au moins 20 pour cent de la plus-value générée par le classement des biens-fonds en zones à bâtir. Dans les cantons où les zones à bâtir ne dépassent pas beaucoup les besoins des quinze années à venir, le produit de la taxe sur la plus-value suffira à couvrir les indemnités de déclassement. En cas d'obstacle financier insurmontable, des solutions financièrement supportables pourront être recherchées, notamment en échelonnant dans le temps la rectification des zones à bâtir, par exemple par la création de zones de réserve ou en procédant à plusieurs adaptations successives. Les déclassements pourront ainsi s'étendre sur une longue période ¬- jusqu'à une vingtaine d'années.

Il faut en outre bien voir que de nouveaux classements en zones à bâtir seront avant tout effectués à des emplacements plutôt attrayants et recherchés par la population et les entreprises, et par conséquent plus chers. Le produit de la taxe y sera donc plus élevé. D'expérience, les déclassements seront par contre opérés en premier lieu à des emplacements périphériques où la demande est plus faible - les prix y seront donc plus bas et les indemnités moins élevées. De plus, selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, le déclassement de terrains à bâtir très éloignés du milieu bâti équipé donne rarement lieu à une indemnisation.

Quelle est la finalité de la taxe sur la plus-value?

Quand un terrain est classé en zone à bâtir, sa valeur s'accroît fortement. La révision contraint les cantons à taxer désormais cette plus-value à au moins 20 pour cent. Les propriétaires ne devront toutefois pas acquitter la taxe immédiatement mais seulement lorsqu'ils auront touché la plus-value, à savoir après avoir vendu ou construit leur bien-fonds. Les cantons et les communes utiliseront le produit de la taxe pour indemniser les propriétaires qui y ont droit parce que leur bien-fonds a été déclassé et a donc perdu de la valeur. Selon les cas, il pourra aussi être utilisé pour financer l'aménagement de places publiques, de parcs ou de routes. Le quartier de Berne-Brünnen constitue un bon exemple en la matière. Grâce aux contrats passés entre la ville et des propriétaires fonciers sont nés des parcs et des aménagements attrayants. A Berne-Brünnen s'est ouvert le déjà célèbre centre commercial Westside et des logements pour 2500 personnes au moins ont été créés.

La taxe sur la plus-value introduite par la révision de la loi s'appuie sur les expériences positives faites par plusieurs cantons: ce régime de compensation est en effet déjà en place dans les cantons de Bâle-Ville, Neuchâtel, Genève et Thurgovie. Dans les cantons de Berne, de Glaris, des Grisons et d'Obwald, les communes peuvent s'assurer une part de la plus-value en passant un contrat avec les propriétaires.

La révision vise également à améliorer la disponibilité des terrains à bâtir. Quelle est la volonté sous-jacente?

Actuellement, de nombreuses communes disposent de terrains à bâtir, mais constatent cependant qu'ils ne sont pas utilisés. Conséquence: malgré les réserves existantes, elles sont contraintes de classer en zone à bâtir de nouvelles parcelles situées en lisière du milieu bâti. Or, celles-ci se prêtent souvent moins bien à la construction et génèrent des coûts d'équipement élevés. De plus, les communes débordent alors vers la périphérie et ne font ainsi qu'aggraver le mitage du territoire. La révision de la loi sur l'aménagement du territoire prévoit donc que les cantons et les communes pourront prendre des mesures visant à améliorer l'utilisation des terrains à bâtir existants, en tenant compte des besoins locaux. Le remaniement parcellaire est l'un des moyens pour y parvenir: il permet d'échanger des biens-fonds ou de rectifier les limites de parcelles mal découpées pour en faire des parcelles propres à la construction. Cet instrument est déjà utilisé dans plusieurs cantons.

La thésaurisation foncière est la raison la plus fréquente pour laquelle les terrains constructibles ne sont pas utilisés. Parfois, le bien-fonds recèle une valeur affective pour les propriétaires car il s'est transmis dans la famille de génération en génération. Mais bien souvent, les propriétaires considèrent le terrain non bâti comme un pur placement d'investissement et spéculent à terme sur le renchérissement du prix du terrain. Ce raisonnement est contraire au but et à l'objet de la délimitation de zones à bâtir. Si un intérêt public prépondérant le justifie, les cantons et les communes doivent à l'avenir pouvoir à titre exceptionnel fixer aux propriétaires des délais de construction. La loi sur l'aménagement du territoire révisée charge les cantons de créer les bases légales nécessaires pour de tels délais de construction. En contribuant ainsi à empêcher que des parcelles constructibles situées dans des endroits prisés soient soustraites au marché et alimentent la flambée des prix, ces mesures lutteront contre la spéculation et la thésaurisation foncières.

En général, plus un bien est rare, plus il est cher. Du fait de la hausse des prix fonciers, la révision va-t-elle aussi faire grimper les coûts de logement, pour les locataires comme pour les propriétaires?

Non. Les réserves de terrains à bâtir ne se situant pas, pour la plupart, là où la demande est la plus forte, la réduction des zones à bâtir surdimensionnées requise dans certains cas par la révision de la loi sur l'aménagement du territoire aura un impact minime sur les prix des terrains, de l'immobilier et sur les loyers. D'autres paramètres tels que l'accessibilité ou le niveau d'imposition ont une influence nettement plus marquée sur les prix de la propriété du logement.

En certains endroits, la thésaurisation délibérée de terrains à bâtir contribue également à tirer les prix vers le haut puisque ces terrains sont en quelque sorte soustraits au marché. La révision de la loi sur l'aménagement du territoire palliera cette situation en visant aussi à rendre les biens-fonds constructibles plus disponibles et donc à contrer la spéculation. L'un des moyens pour y parvenir est le remaniement parcellaire, qui consiste à échanger des terrains à bâtir pour créer des parcelles d'un seul tenant se prêtant à la construction.

Les propriétaires fonciers devront-ils dorénavant passer à la caisse deux fois, en s'acquittant de la taxe sur la plus-value puis encore de l'impôt sur les gains immobiliers?

Non. La loi révisée exige que la taxe sur la plus-value puisse être considérée comme une charge déductible des gains lors du calcul d'un éventuel impôt sur les gains immobiliers. Il s'agit là de deux domaines clairement distincts l'un de l'autre.

La loi révisée sur l'aménagement du territoire se fonde sur les besoins prévisibles pour les quinze années à venir. En cas de forte croissance de la population, les agglomérations pourront donc continuer à s'étendre. Une séparation plus claire des territoires ne serait-elle pas nécessaire?

Il est important de définir les zones à bâtir avec mesure car de trop grandes réserves favorisent une urbanisation éparse. La forte consommation du sol nuit au paysage et entraîne, en outre, des coûts plus élevés pour le raccordement de ces territoires au réseau routier et aux conduites d'eau, d'électricité et d'égouts.

Une séparation absolue serait toutefois contreproductive: lorsque les zones à bâtir dépassent les besoins prévisibles pour les quinze prochaines années, la révision de la loi sur l'aménagement du territoire impose qu'elles soient réduites. En revanche, lorsque la croissance de la population et l'installation de nouvelles entreprises sont prévisibles, il reste possible de créer de nouvelles zones à bâtir.

L'initiative pour le paysage veut également limiter l'utilisation du sol. Quelles seraient ses implications concrètes?

L'initiative pour le paysage entend donner plus de compétences à la Confédération et se traduirait par un gel des zones à bâtir en Suisse pour vingt ans. Cette mesure serait erronée car de nombreux cantons n'auraient alors plus la possibilité de classer de nouveaux terrains en zone à bâtir en cas de besoin, ce qui pèserait lourdement sur leur développement économique: lorsque la croissance de la population et l'installation de nouvelles entreprises sont prévisibles, les autorités doivent rester en mesure de procéder à des classements en zone à bâtir. De plus, l'initiative pour le paysage récompenserait les cantons qui ont défini des zones à bâtir surdimensionnées, tandis que les bons élèves, qui ont agi correctement par le passé, seraient pénalisés.

Le Conseil fédéral rejette par conséquent l'initiative pour le paysage, qu'il juge trop rigide. La révision de la loi sur l'aménagement du territoire, qui a été adoptée par le Parlement en tant que contre-projet indirect à l'initiative, apporte des solutions plus adaptées. Le Conseil fédéral recommande donc d'accepter la révision de la loi car elle permettra à la Suisse de conserver son attrait comme lieu de résidence et de travail.

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